Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Bruno Boudard
10/18
L'attaque menée par les Japonais sur Pearl-Harbour en 1941 provoqua l'entrée des Etats-Unis en guerre aux côtés des alliés. Elle fit naître sur le continent américain un profond sentiment anti-japonais auquel furent confrontés des milliers de Nippo-américains parfaitement intégrés. En réaction à cette attaque, le FBI procéda à l'arrestation et à l'internement de milliers de Nippons qui furent proclamés "totalement inassimilables et loyaux à l'empereur". Des familles entières furent déplacées vers des "Relocation Centers" (en réalité, des camps de concentration) disséminés dans l'ouest des Etats-Unis ; elles y furent maintenues jusqu'à la fin du conflit.
Dans ce qui est son premier roman, Julie Otsuka nous invite à partager le destin d'une de ces familles. Un matin, le père est arrêté sans un mot, sans une explication. Peu après, la mère et les enfants (un jeune garçon et sa soeur aînée) sont déportés. Ils embarquent à bord d'un train, ignorants de leur destination mais conscients de la précarité de leur avenir. Derrière eux, ils laissent leur maison, leurs souvenirs, leur vie.
Dans le camp, la vie s'organise au quotidien. Les baraquements, les files, la promiscuité... chacun réagit différemment. Si la mère semble faire preuve d'une force tranquille, elle cède pourtant à un désespoir silencieux. Le fils, très attaché à son père dont il guette les moindres courriers, semble être celui qui souffre le plus de ce déracinement. La fille quant à elle, aux portes de l'adolescence, est surtout animée par une pulsion de vie.
A la fin de la guerre, chacun est renvoyé chez soi avec un billet de train et 25$ dans la poche. La vie reprend son cours, même si dorénavant, dans le quartier, tous évitent de croiser le regard de ces "revenants". Un jour enfin, c'est le père qui réapparaît, méconnaissable... Ce qui illustre un épisode historique est le témoignage d'une profonde injustice envers des innocents. Le dernier chapitre du roman en témoigne avec une force décuplée.
Outre le fait qu'il s'inspire de faits réels ayant directement touché sa famille, ce qui donne de la puissance au texte de J. Otsuka, c'est paradoxalement le détachement avec lequel elle construit son récit. Pas de nom ou de prénom pour les personnages principaux, pas ou peu de détails physiques... L'histoire de cette famille symbolise celle de toutes les familles déportées. Le style épuré et le ton narratif sans emphase donnent à ce récit une intensité et une dignité que l'on retrouve, par ailleurs, dans un autre de ses romans, Certaines n'avaient jamais vu la mer.
On ressort de cette lecture profondément touchés et plus que jamais conscients de la fatalité qu'il y a à se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. En cela, l'histoire n'a malheureusement pas fini de se réécrire.
Dans ce qui est son premier roman, Julie Otsuka nous invite à partager le destin d'une de ces familles. Un matin, le père est arrêté sans un mot, sans une explication. Peu après, la mère et les enfants (un jeune garçon et sa soeur aînée) sont déportés. Ils embarquent à bord d'un train, ignorants de leur destination mais conscients de la précarité de leur avenir. Derrière eux, ils laissent leur maison, leurs souvenirs, leur vie.
Dans le camp, la vie s'organise au quotidien. Les baraquements, les files, la promiscuité... chacun réagit différemment. Si la mère semble faire preuve d'une force tranquille, elle cède pourtant à un désespoir silencieux. Le fils, très attaché à son père dont il guette les moindres courriers, semble être celui qui souffre le plus de ce déracinement. La fille quant à elle, aux portes de l'adolescence, est surtout animée par une pulsion de vie.
A la fin de la guerre, chacun est renvoyé chez soi avec un billet de train et 25$ dans la poche. La vie reprend son cours, même si dorénavant, dans le quartier, tous évitent de croiser le regard de ces "revenants". Un jour enfin, c'est le père qui réapparaît, méconnaissable... Ce qui illustre un épisode historique est le témoignage d'une profonde injustice envers des innocents. Le dernier chapitre du roman en témoigne avec une force décuplée.
Outre le fait qu'il s'inspire de faits réels ayant directement touché sa famille, ce qui donne de la puissance au texte de J. Otsuka, c'est paradoxalement le détachement avec lequel elle construit son récit. Pas de nom ou de prénom pour les personnages principaux, pas ou peu de détails physiques... L'histoire de cette famille symbolise celle de toutes les familles déportées. Le style épuré et le ton narratif sans emphase donnent à ce récit une intensité et une dignité que l'on retrouve, par ailleurs, dans un autre de ses romans, Certaines n'avaient jamais vu la mer.
On ressort de cette lecture profondément touchés et plus que jamais conscients de la fatalité qu'il y a à se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. En cela, l'histoire n'a malheureusement pas fini de se réécrire.