Sri Lanka, plantation de thé à Nuwara Eliya (© Sylvie Strobl)

dimanche 6 octobre 2013

L'eau et la terre

Séra
Delcourt Mirages
Tome 1 : L'eau et la terre 1975-1979 (préface de Rithy Panh)
Tome 2 : Lendemains de cendres 1979-1993 (préface de Bernard Kouchner)

Il y a quelques semaines, je vous présentais deux tomes d'une BD consacrée au Cambodge, L'Année du lièvre. Quelle n'a pas été ma surprise de découvrir récemment deux autres volumes consacrés au Cambodge et au génocide perpétré par les Khmers Rouges, sous la signature d'un autre dessinateur d'origine cambodgienne, Séra.

Né à Phnom Penh en 1961 et émigré en France en 1975, Séra a étudié les arts visuels à la Sorbonne où il enseigne actuellement, et publié son premier album de BD en 1985.

L'eau et la terre (1975-1979), ce sont des destins qui s'entrecroisent au lendemain de l'évacuation brutale de Phnom Penh par les Khmers Rouges. Citadins et paysans se retrouvent au milieu des rizières, sur les routes de campagnes sillonnées également par leurs bourreaux ; ceux-là même qui, voulant faire faire au peuple cambodgien un grand bond en avant, le précipitèrent en fait dans un gouffre sans fond, comme l'écrit le cinéaste Rithy Panh dans sa préface.

Ponctué de slogans de l'Angkar (le nouveau parti ouvrier du Kampuchéa), enrichi de cartes indiquant les mouvements de déportation de la population ou l'emplacement des prisons, et illustré dans une déclinaison de tons sepia, L'eau et la terre surprend d'emblée par un dessin au réalisme quasi photographique. Il en va de même pour Lendemains de cendres qui, dans une palette chromatique dominée cette fois par le vert-de-gris, relate l'invasion du pays par les troupes vietnamiennes et la chasse aux contre-révolutionnaires qui s'en suivit. Exil, déportation... la population cambodgienne continue à subir moultes pressions et violences et l'on voit à quel point le peuple cambodgien a souffert durant de nombreuses années de la folie meurtrière qui s'est emparée de ses voisins, mais aussi d'une fraction de ses "frères".

Si j'avais apprécié L'année du lièvre, je suis davantage touchée par l'oeuvre de Séra, en grande partie par la qualité du dessin. Un dessin rempli d'émotion et de sensibilité qui se suffit presque à lui-même. Le texte, tout en retenue, n'est là que pour ponctuer ce que les images nous donnent à voir. Véritable respiration dans cet univers de cruauté et de souffrance, les dernières pages de Lendemains de cendres sont illustrées d'aquarelles réalisées par Séra lors de son premier retour au Cambodge, en 1993. Un retour sur son passé et ses souvenirs d'enfance qui marque aussi, pour la population, un retour à la vie.

Derrière le site de Killing Fields, un étang rempli de lotus, comme le symbole de la paix retrouvée
(© Sylvie Strobl)


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