Sri Lanka, plantation de thé à Nuwara Eliya (© Sylvie Strobl)

dimanche 25 août 2013

Parfum de pagode

Anna Moï
Editions de l'aube (poche)
Nouvelles


Anna Moï est née à Saïgon où elle a étudié le français très tôt. C'est dans cette langue qu'elle maîtrise parfaitement qu'elle a écrit "Parfum de pagode". En lisant ce recueil, je n'ai pas pu m'empêcher de penser à un peintre devant son chevalet. Seurat ou Signac, ou encore Théo Van Rysselberghe. Un de ces artistes qui nous ont donné à percevoir le réel non pas de manière hyper-réaliste, mais par petites touches, par taches de couleurs. Voilà comment Anna Moï nous fait découvrir son pays. 

Il est évidemment très difficile de résumer un tel recueil, si intimiste et personnel. Je m'arrêterai donc sur une nouvelle qui m'a particulièrement touchée : "Le fusil et le violoncelle". L'histoire des deux frères K., violoncellistes tous deux, qui ont fait le choix de la musique dans ces circonstances bien particulières. 
De 1978 à 1991, le Vietnam et le Cambodge sont en guerre. Les jeunes gens sont appelés à servir leur pays. "L'exemption militaire est accordée exclusivement à deux catégories d'appelés : les étudiants de la faculté de médecine - car le Viêt-Nam a besoin de médecins -, ou ceux du conservatoire de musique, car le Viêt-nam a besoin de musiciens". Entre le fusil et le violoncelle, le choix ne repose donc pas sur d'éventuels dons artistiques mais sur un critère plus essentiel : sauver sa peau. Et s'il faut payer pour intégrer le conservatoire, qu'importe : c'est le prix de la vie. En quelques pages à peine, toute la fragilité d'un destin est ainsi esquissée, posant du même coup la question essentielle du bien et du mal. Et la musicienne qu'est aussi Anna Moï supplante l'écrivain  pour conclure : "Ils n'éprouvent pas de haine à l'égard de ceux qui n'ont pas eu à choisir entre la guerre et la musique. Il n'y a pas lieu, d'ailleurs. L'injustice n'est pas là. Elle est dans le fait que nous ne sommes pas tous des musiciens".

Peut-être faut-il être allé au Vietnam pour apprécier pleinement ces nouvelles, avoir découvert le pays par ses sens plutôt que par les musées ou les monuments. On pourra alors feuilleter le recueil comme on regarderait un album photo : chaque cliché fera renaître l'émotion de l'instant.


Pagode de la Dame Céleste, Hué (© sylvie Strobl)


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