Sri Lanka, plantation de thé à Nuwara Eliya (© Sylvie Strobl)

dimanche 28 avril 2013

Du domaine des Murmures

Carole Martinez
Folio n°5552


C'est à un voyage dans le temps que je vous convie cette semaine. Quittons notre 21e siècle pour marcher sur les traces d'Esclarmonde, jeune fille de 15 ans qui, le jour de ses noces, alors que la foule et le clergé attendent son consentement, a l'audace de refuser l'homme auquel son père l'a promise. 

Nous sommes en 1187. Quelque part dans la France profonde, Esclarmonde vient de poser un geste d'une grande modernité pour l'époque. Elle  a osé dire "non", s'opposant ainsi à un destin tout tracé, lui préférant une vie de recluse. En effet, pour échapper au mariage, la jeune fille offre sa vie à Dieu et choisit d'être emmurée. Tôt le matin, alors qu'il ne lui reste plus que quelques heures de liberté, elle s'offre une dernière balade afin de "jouir pleinement de cette dernière aube". Violée au milieu des fougères, elle ignore, lorsque commence sa réclusion, qu'elle porte un enfant.

Très vite, la jeune fille attire nombre pèlerins et pêcheurs qui viennent se confier à elle. Dans sa cellule simplement munie d'une "fenestrelle" à barreaux, elle écoute les uns et les autres. Versée dans la prière, elle apporte réconfort et soutien ; ses paroles comblent ceux qui l'approchent et on lui attribue des dons particuliers. La naissance de son fils, alors que tous la croient immaculée, attise encore la ferveur : on crie au miracle ! Mais celle qui, jusqu'alors, avait réservé son amour à Dieu découvre avec la maternité un amour bien terrestre celui-là. Partagée entre la tendresse qu'elle délivre à son enfant et les visions qui lui recommandent d'envoyer son père et ses proches en Terre Sainte, elle nous relate son histoire au fil d'un conte à la fois mystique et psychanalytique qui pourrait effrayer tant il est loin de notre époque "moderne" mais qui, au contraire, nous emporte dans un univers ardent.

Carole Martinez m'avait déjà séduite avec son roman "Le cœur cousu". Elle confirme ici son talent de conteuse et la richesse de son écriture. Car la langue dont elle use pour faire parler Esclarmonde est à la fois poétique et sensuelle, servie par un vocabulaire subtil. Elle nous entraîne, tout au long de son récit, dans un moyen-âge qui accordait peu de place aux femmes : par la voix de son héroïne, elle leur redonne vie.

"Du domaine des Murmures" a obtenu le Goncourt des lycéens en 2011

2 commentaires:

  1. Oli m'a rapporté une pile de livres hier, et celui-ci en faisait partie (conseillé par un des vendeuse littéraire)!

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  2. Je suis impatiente de savoir ce que tu en penses !

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